Laisser pleurer bébé : les effets sur son sommeil

Le sommeil est un état dans lequel on ne peut obliger un enfant à entrer. L’enfant se laisse surprendre par le sommeil. Le rôle des parents se limite à créer un environnement propice au sommeil, Dr Sears

Malheureusement, vous obtiendrez généralement un autre type de remarque de la part de votre entourage : il doit dormir, il doit savoir se coucher seul, s’endormir seul et rester couché, il doit être couché avant 20h, vous devez avoir votre soirée sans votre enfant, et j’en passe.

Ces remarques couplées à toutes les informations erronées qui circulent sur le sommeil des bébés finissent par persuader les parents que leur enfant a un problème, que leur enfant n’est pas « normal ». D’autant que beaucoup de membres du corps médical n’aident pas à diffuser la bonne information et continuent de prodiguer une information erronée à nous, pauvres parents désemparés.

Mais qui suis-je moi, me direz-vous, pour que ma parole ait plus d’importance pour une jeune maman que celle de sa pédiatre, de son médecin généraliste, de la sage-femme de l’hôpital ? C’est tout de même leur métier !

Malheureusement, sur les questions liées au sommeil, la force du titre l’emporte sur la véracité des conseils qu’ils prodiguent.

Pourtant comme l’écrit justement Jean Liedloff dans son ouvrage Le concept du continuum :

Je suis convaincue que la très grande majorité des parents aiment vraiment leur enfant mais qu’ils le privent d’expériences essentielles à son bonheur car ils ignorent ce qui le fait souffrir autant. S’ils comprenaient l’agonie de leur bébé laissé en pleurs dans un berceau, son terrible désir, les conséquences de cette souffrance, les conséquences des lacunes sur le développement de sa personnalité et son potentiel à bâtir une vie heureuse, je ne doute pas un seul instant qu’ils feraient tout pour l’empêcher de rester seul, même une minute.

Sauf que la réalité est toute autre, que fait le parent désemparé et épuisé que l’on a convaincu que son enfant devrait déjà dormir des nuits complètes et que le laisser pleurer un peu lui permettra de trouver le sommeil, d’apprendre à dormir ?

Il « ferberise » son enfant !

Il va donc recourir à l’une des nombreuses méthodes mises au point dans les années 80 par les Dr Spock, Valman et le plus connu chez nous, le Dr Richard Ferber, pour n’en citer que quelques-uns et dont on retrouve de nombreux dérivés dans de nombreux livres et articles.

Toutes ces méthodes sont peu ou prou identiques : il s’agit d’apprendre à l’enfant à s’endormir seul, souvent en respectant un tableau horaire de présence du parent auprès de l’enfant (vous savez le fameux 5-10-15), et le tout en une approche progressive. Elles ont également en commun de reconnaître que l’enfant pleurera mais de promettre qu’au bout de quelques jours, l’enfant cessera de pleurer et dormira ou, selon l’expression consacrée, « fera ses nuits ».

Pourtant, on le sait maintenant, et la recherche est très claire sur le sujet, ces méthodes n’ont pas pour effet d’apprendre aux enfants à dormir.

D’ailleurs, comme le souligne Carlos Gonzales dans son ouvrage Serre-moi fort :

Même les experts partisans de « l’enseignement du sommeil aux enfants » (Estivill & Béjar par exemple, ndlr) reconnaissent ce fait : l’objectif de leurs méthodes n’est pas d’obtenir que l’enfant ne se réveille plus, c’est impossible. Ce qu’ils veulent, c’est que, quand il se réveille, il se taise au lieu d’appeler ses parents et se rendorme sans rien dire.

Richard Ferber, lui-même, est revenu sur ses conclusions et a déclaré  »Laisser simplement un enfant dans un berceau crier seul pendant de longues périodes jusqu’à ce qu’il s’endorme, peu importe le temps que cela prenne, n’est pas une approche que j’approuve. Au contraire, un grand nombre des approches que je recommande sont pensées précisément pour éviter les pleurs non nécessaires. ». Il affirme que de laisser pleurer un bébé jusqu’à s’en épuiser n’est pas la solution aux problèmes de sommeil que les parents rencontrent chez leurs enfants. Il affirme également que le cododo peut s’avérer très efficace et être la meilleure solution pour certaines familles.

Qu’éprouve un enfant que l’on laisse pleurer ?

Le problème des bébés, c’est qu’ils ne peuvent pas exprimer de façon intelligible pour l’adulte leurs ressentis. Mais si l’on considère l’enfant comme un individu, et que l’on tente de se mettre à sa place l’espace de quelques instants, il est assez aisé de concevoir que de le laisser pleurer est un acte barbare à son encontre.

Je n’ai pas meilleure illustration du sentiment que peut éprouver un bébé dans cette situation que cet extrait de l’ouvrage de Jean Liedloff, Le concept du continuum :

Il pleure et pleure encore ; ses poumons, nouvellement exposés à l’air, sont épuisés par le désespoir dans son cœur. Personne ne vient. Faisant confiance à la vie, comme il est inscrit dans sa nature, il fait la seule chose dont il est capable, et continue à pleurer. Finalement, une éternité plus tard, il s’endort, épuisé.

Il se réveille au milieu d’un silence cruel, dans l’oubli, dans un endroit sans vie. Il crie. Des pieds à la tête, il brûle de désir, de volonté et d’impatience. Il suffoque et hurle jusqu’à ce que ses sanglots résonnent dans sa tête et la fassent vibrer. Il crie jusqu’à ressentir une douleur dans la poitrine et dans la gorge. Il ne peut plus supporter cette souffrance. Ses sanglots s’affaiblissent et cessent. Il écoute. Il ouvre et ferme les poings. Il roule la tête d’un côté puis de l’autre. Rien n’y fait. C’est insupportable. Il recommence à pleurer, mais cela en est trop pour sa gorge épuisée ; il s’arrête. Il raidit son petit corps torturé par le désir et en retire un léger soulagement. Il agite les mains et gigote. Il s’arrête, capable de souffrir, mais incapable de penser, incapable d’espérer. Il écoute et se rendort.

Par ailleurs, comme l’écrit très justement le Dr Sears, les pleurs ne sont pas de simples sons. Il s’agit de signaux et la réponse des parents à ces signaux apprend à l’enfant que les signaux qu’il émet ont une signification.

Qu’enseigne-t-on à l’enfant que l’on laisse pleurer ?

Outre, les réactions chimiques et hormonales qui résultent d’un laisser-pleurer, il y a également des conséquences psychologiques.

Ainsi au niveau psychologique, vous lui apprenez que ses pleurs n’ont aucune valeur pour communiquer. Vous lui apprenez à démissionner. Ses besoins existeront toujours lorsqu’il aura cessé de pleurer, il aura juste appris à ne plus vous solliciter afin de les combler.

Le Dr Sears écrit ainsi que

Le fait de restreindre l’accès à la source de sécurité de l’enfant risque de laisser des séquelles à long terme sur son bien-être physique et mental.

Quelles sont les séquelles de ce types de méthodes ?

Ces méthodes ont un effet commun : le taux élevé de cortisol, d’adrénaline et autres hormones du stress libérés à l’occasion de l’épisode de traumatisme vont endommager durablement la biochimie du cerveau de l’enfant, tant ses cellules cérébrales que sa mémoire.

Et qu’on le comprenne bien : il n’y a pas de méthode « douce ». Toutes ces méthodes provoquent les mêmes effets chez l’enfant.

Les séquelles les plus importantes que l’on peut noter chez les enfants sont l’anxiété, la dépression, l’impuissance acquise (l’enfant pense que quoi qu’il fasse, il n’obtiendra jamais ce qu’il souhaite), le syndrome de stress post-traumatique (caractérisé par la peur, le désespoir ou une horreur intense), troubles de dépendance affective (dommage, pour ceux qui voulaient le rendre plus autonome), perturbations du comportement (hyperactivité, hypervigilance, accès de colère, sur-réactions).

Et si l’enfant pleure juste quelques jours ? 

Cette question est légitime car les séquelles dont on parle précédemment semblent lourdes pour quelques petits jours de pleurs. Je ne sais pas honnêtement à partir de quand on parle de ces séquelles. Les détracteurs écrivent que ces données sur le cortisol et ses effets ne sont pas si précises et peut être ont-ils raison. Pour ma part, je suis incapable, viscéralement incapable, de laisser mes enfants pleurer sans les prendre dans mes bras. Du coup, je ne me pose pas vraiment cette question.

Et si j’accompagne mon bébé dans ses pleurs ? 

En revanche, je pense qu’il convient de différencier la situation où l’enfant est laissé pleuré seul dans sa chambre et les situations où les parents décidant de changer certaines habitudes de sommeil, l’enfant proteste en pleurant. Parce que oui, vous avez le droit de ne plus en pouvoir et de vouloir changer des choses et oui, dans 99% des cas ces changements vont occasionner des pleurs de la part de votre enfant. Personnellement, j’ai « subi » la situation avec mes filles car j’étais incapable de les laisser pleurer même en les accompagnant pour changer leurs habitudes de sommeil et forcer un peu le destin. Par contre, lorsque j’ai été prête, j’ai affronté ces pleurs et je les ai accompagné quand j’ai souhaité sevrer mes filles de l’allaitement. Tout est donc une question de limites et celles-ci sont évidemment bien personnelles.

Pourquoi vaut-il mieux répondre aux pleurs de bébé ?

Disons quelques lignes tout de même sur les aspects positifs d’une réponse adéquate aux besoins de bébé. Les pleurs de bébé ont un impact sur le système hormonal de la maman. La mère qui laisse pleurer son bébé sape sa confiance et fausse son intuition. Elle inhibe le développement de son instinct maternel. Ainsi, a contrario, une mère qui répond aux besoins de son enfant développe son instinct maternel et apprend à reconnaître les signaux de son bébé et à comprendre son langage.

De son côté, pour le bébé, trouver une réponse à ses pleurs lui apprend que ses actions ont un effet sur les autres, qu’il a de la valeur.

« C’est le début de l’acquisition de l’estime de soi » selon le Dr Sears.

Souvenez-vous toujours que c’est une personne qui pleure.

Un bébé est une personne.

Vous ne laisseriez pas votre mari, ou votre mère, sœur, collègue pleurer, alors ne laissez pas votre bébé pleurer.

Sources :

  • Serre-moi fort, Dr Carols Gonzales
  • Dormir sans larmes, Dr Rosa Jové
  • Etre parents la nuit aussi, Dr William Sears
  • Un sommeil paisible et sans pleurs, Elizabeth Pantley
  • Le concept du continuum, À la recherche du bonheur perdu, Jean Liedloff

11 commentaires sur “Laisser pleurer bébé : les effets sur son sommeil

  1. Quand vous parlez d’un bébé, vous parlez d un bébé naissant, un bébé de quelques semaines, un bébé de 3 mois, 5 mois, 9 mois, 12 mois?
    Merci

    J’aime

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s