Le bilinguisme : une richesse pour nos enfants

Mon mari et moi-même sommes tous les deux d’origine étrangère, de mon côté, plus de 70% de ma famille habite à l’étranger alors autant dire que c’était une évidence que nos enfants parleraient les deux langues. La question était plutôt sur le comment allait-on s’y prendre ?

Par ailleurs, sur le plurilinguisme des enfants, on entend toujours dire que les enfants sont des éponges et qu’ils peuvent apprendre facilement une multitude de langues. Qu’en est-il vraiment ?

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  • Bébé est-il capable d’apprendre une autre langue ?

L’âge idéal pour enseigner à bébé une langue étrangère se situe entre 0 et 3 ans, période durant laquelle ses facilités d’acquisition sont particulièrement marquées.

Le bilinguisme précoce a pourtant longtemps été regardé avec suspicion et jusque dans les années 1960, on pensait qu’apprendre deux langues en même temps risquait d’entraîner une confusion dans la tête de l’enfant, voire un retard mental. Ce qui explique bon nombre d’enfants ne parlent pas leur langue d’origine. Beaucoup de parents immigrés ont également abandonné l’apprentissage de leur langue natale par soucis d’intégration.

Aujourd’hui, on sait de façon certaine que le bilinguisme n’est pas une source de trouble du langage ou de l’apprentissage. On sait même que le bilinguisme favorise l’apprentissage d’une troisième langue.

En tout état de cause, parler plusieurs langues est aujourd’hui un atout majeur, une richesse tant personnelle que culturelle et une cartouche supplémentaire pour la vie professionnelle future de nos bambins.

Alors certainement que bébé ne parlera pas parfaitement les deux langues tout de suite et qu’il lui arrivera d’intervertir certains mots, mais c’est tout à fait normal dans le processus d’apprentissage et ces mélanges linguistiques se résorbent naturellement, au fil de l’apprentissage.

De même, si l’enfant développe sa langue secondaire plus rapidement que sa langue principale, inutile de s’inquiéter. À l’entrée en maternelle, l’enfant rattrape très vite son retard dans un environnement uniforme, où tout le monde parle la même langue, et a même tendance à assimiler plus rapidement la langue que ses copains monolingues.

  • Comment s’y prendre ?

Il n’y a pas de miracle : pour que bébé soit bilingue, il faut lui parler les deux langues (oui oui, je sais, faut pas avoir fait Bac+5 pour conclure ça !!). Il est certainement plus profitable de parler à bébé la langue secondaire dès la naissance et en abondance, pour le familiariser au plus tôt avec les sons, les intonations et l’accent car comme le précise Céline Alvarez dans son ouvrage Les lois naturelles de l’enfant, très tôt l’enfant se spécialise dans sa/ses langues.

En tout état de cause, pour qu’un enfant puisse s’exprimer couramment dans deux langues, il doit les entendre souvent et avoir l’occasion de les parler. L’interaction et l’immersion sont primordiales.

Le plus gros ennemi du plurilinguisme est le temps : une langue qui ne se pratique pas, s’oublie. Article super sur le sujet à lire ici.

Si l’un des parents parle français et l’autre, la langue secondaire, il est important de multiplier les occasions où l’enfant est exposé à cette langue secondaire.

Un moyen efficace et ludique pour stimuler l’apprentissage consiste à lire des histoires ou à lui chanter des chansons et comptines dans les différentes langues qui l’entourent.

  • Aucun des parents n’est bilingue : bébé peut-il le devenir ?

Si aucun des parents n’est bilingue, il y a peu de chances que bébé le devienne, à moins d’être en contact quotidien ou très très régulier avec une personne parlant une langue étrangère (au pair par exemple).

  • Notre expérience

Mon mari et moi sommes tous les deux d’origine étrangère et parlons la même langue maternelle (le serbo-croate). Lui et son père avant lui sont nés en France et il a donc une grosse partie de sa famille ici. Moi, je suis née à l’étranger et quasi la totalité de ma famille y est toujours, mon père y compris. Il était donc évident pour nous d’apprendre cette langue secondaire à nos enfant. Comme je l’écrivais en introduction, la question était plutôt, comment ?

Avant la naissance d’Alex, nous nous étions mis d’accord que les grands-parents lui parleraient la langue secondaire tandis que nous nous concentrerions sur le français. Et finalement, quand elle est née, nous avons trouvé cela plus naturel de nous adresser à elle dans notre langue maternelle (langue secondaire pour elle). Et peu à peu, nous nous sommes rendus compte que si nous ne lui parlions pas notre langue, elle ne l’apprendrait finalement pas de façon correcte. Mais c’est difficile pour nous car entre nous (son père et moi) nous nous parlons plus facilement et plus naturellement en français !! Alors on se fait violence, c’est pour la bonne cause ! Ça a beau être notre langue maternelle, nous n’avons pas été à l’école là-bas et j’ai peur de vite atteindre mes limites en termes de vocabulaire.

Du coup, nous nous adressons à elle principalement en serbo-croate et parfois en mélangeant les deux langues. Elle a été gardée 2,5 ans par une nounou qui lui parlait en français et a très bien assimilé les deux. Elle sait qu’il y a deux mots pour tout et utilise celui qu’elle souhaite. Elle s’adapte aussi avec une facilité déconcertante à ses interlocuteurs et s’adresse à eux dans la bonne langue et ce même au sein d’une seule et même conversation. Elle demande naturellement à ce qu’on lui lise dans la langue qu’elle désire entendre. On essaie d’avoir un équilibre dans tous les supports : musique, livres. Ma mère lui parle exclusivement notre langue et la gardera tous les mercredis à partir de la rentrée à l’école maternelle. Cela contribuera à contrebalancer un peu les journée 100% français à l’école.

A-t-elle parlé « tard » ? 

Pas du tout, elle est même en avance niveau parole alors qu’elle parle 2 langues. Mais l’inverse existe aussi, chaque enfant a son rythme, qu’il soit bilingue ou non.

  • Témoignages 

Témoignage de Marion : 

« Je m’appelle Marion, je suis française mariée à un américain depuis 6 ans et demi. Nous avons fait le choix de vivre en France près de mes parents. Le bilinguisme chez nous est assez naturel. Mon mari ne parlait pas français quand nous nous sommes rencontrés. Et même si maintenant il parle merveilleusement bien le français, l’anglais s’est naturellement imposé à la maison. Avant que notre fils naisse je pensais que j’allais spontanément lui parler en français, ma langue maternelle. J’avais lu des livres et planifié quand je parlerais français ou anglais avec lui. Mais sa naissance à tout bouleversé. Je me suis rendue compte que l’anglais c’est ma langue de cœur, celle avec laquelle j’aime. Et j’ai commencé à lui parler anglais même à demi endormie au milieu de la nuit ! Ça m’a un peu perturbée je dois l’avouer. Maintenant je lui parle français uniquement si j’en ressent le besoin ou si nous sommes avec des gens qui ne parlent pas anglais. Mon mari ne lui parle qu’anglais ou presque. Autour de nous tout le monde parle français. On lit des livres dans les deux langues et il nous donne indifféremment les livres à lire qu’ elle que soit la langue. On essaie aussi de Skyper avec ses grands-parents paternels et ses oncles et tantes aussi souvent que possible. Et on va essayer de voir au moins une partie de la famille tous les ans ou tous les deux ans. Il a 15 mois et on voit déjà qu’il assimile le vocabulaire rapidement. La langue des signes aide beaucoup je trouve. Un signe, deux mots pour une même chose, ça fait du lien, du sens. Il sait déjà aussi adapter la langue à la personne car il va nous dire «thank you» mais «merci» à mes parents. C’est une expérience fabuleuse. On a un peu peur que le français prenne le dessus et qu’il refuse de nous parler anglais à un moment mais comme tous les parents bilingues j’imagine. En attendant on profite un maximum pour passer du temps avec lui et qu’il soit exposé à l’anglais avant d’entrer à l’école. Nous n’avons pas d’écoles ou d’ateliers bilingues à moins d’1h de chez nous et je rêve secrètement de créer quelque chose pour qu’il puisse rencontrer d’autres enfants bilingues ou apprenants. »

Témoignage de Betul : 

« Chez nous le bilinguisme était une évidence ! Je suis d’origine turc (100%), née et grandit en France. Mes parents et ma famille sont en France également. Je suis donc bilingue turco-francais et je parle très bien les deux langues. Mon mari est aussi d’origine turc (100%), mais lui est né et a grandi en Turquie. Ses parents et sa famille sont en Turquie. Il n’était donc pas du tout bilingue. Après le mariage c’était compliqué de vivre en Turquie pour moi alors on a décidé de vivre en France en 2015. Il a donc dû apprendre le français (à 25 ans) et aujourd’hui il se débrouille dans la vie de tout les jours même si la langue parlée à la maison reste en majorité le turc. Même avant d’être parents c’était évident que nos enfants parleraient le turc premièrement car c’est notre langue maternelle et deuxième pour pouvoir partager avec la famille en Turquie. Et puis une langue de plus ce n’est jamais trop pour plus tard. Donc aujourd’hui on a un petit garçon qui aura bientôt 3 ans à qui on parle le turc en priorité car le français il va bientôt l’apprendre à l’école. Il comprend très bien le turc même s’il ne parle pas encore beaucoup et le français il comprend forcément car il l’entend tout les jours. Et sinon il aime écouter les comptines en anglais également donc il a déjà l’oreille habituée à différentes langues. Pour nous ça se passe très bien pour le moment. Sur ce, bon bilinguisme et plurilinguisme 🙂 »

  • Lectures 

Je n’ai lu aucun de ces bouquins mais ils m’ont tous été recommandés pour celles et ceux que cela intéresse !

    • L’enfant bilingue de Ranka Bijeljac-Babic
    • Le bilinguisme, un atout dans son jeu, d’Agathe Tupula Kabola
    • Le défi des enfants bilingues, de Barbara Abdelilah-Bauer
    • 7 Steps to Raising a Bilingual Child, Susan L. Hayes, Naomi Steiner

 

 

 

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